Une école de liberté historiographique, Yves Cohen
Article de revue
Cohen, Y. (2017). Une école de liberté historiographique. Critique, 843-844(8), p.700-711
Mis à jour le 7/9/25
Entreprises et États, syndicats et partis, organisations et mouvements recourent de plus en plus à des agents spécialisés en communication, à des cabinets et bureaux de marketing, de relations publiques, de propagande et de publicité. Or tous ont aujourd’hui un problème commun : la saturation du public. L’ économie est familière de la saturation des marchés et du concept qui l’accompagne, mais cette saturation-là ne correspond pas à une surconsommation. Elle submerge le consommateur, la personne souffrante ou désirante, le citoyen, voire l’enfant, de messages de tous ordres. Chaque domaine de la vie sociale l’exprime de façon particulière. « Dans des marchés saturés et hypersegmentés, les entreprises doivent maintenant trouver des moyens hors du commun [pour] obtenir une fidélisation de leur clientèle », explique une brochure du gouvernement québécois qui prône le marketing sensoriel [1]. La saturation des marchés renvoie ici à celle des consommateurs. Dans la mesure où ceux-ci sont exposés tous les jours à plus de trois mille messages publicitaires, le ministère québécois du développement économique recommande d’utiliser le marketing sensoriel pour « éveiller et stimuler les zones les plus instinctives du cerveau des clients potentiels », « stimuler le plaisir des sens » ou encore « exploiter les cinq sens ». Les sens sont en jeu, ils sont un enjeu premier. Qui en est le maître ? Qui cherche à s’en rendre maître ?